Sur la constitution de la population brésilienne
Sur la constitution de la population brésilienne
En ces temps de Covid 19 et de restriction du carburant, il vous suffit de grimper sur un tapis volant et visiter Mexico et São Paulo pour réaliser que la composition des populations de ces deux mégapoles diffère. A Mexico, une population indienne, autochtone dominante, très peu de Noirs et de descendants de Cortez. A São Paulo, capitale économique du Brésil, des Blancs, des Noirs, des Indiens cuivrés avec tous les dégradés entre ces trois pôles. C’est de cette variété, de cette miscégénation que Gilberto Freyre (1900-1987), écrivain à l’œil sociologique et anthropologique, parle dans son livre de 1933. Freyre est né à Recife, dans le Nordeste du Brésil. Etudiant à l’université de Columbia (New York), il reçoit des enseignements de l’anthropologue Franz Boas qui valorise le travail de terrain.
Contrairement aux Pays andins, au Brésil, si l’on excepte l’état du Minas Gerais, c’est le potentiel agricole des zones côtières qui séduit les premiers colons portugais et non les richesses minières. Dans le Nordeste, ils développent dans de grandes fazendas la monoculture de la canne à sucre qui demande une abondante main d’œuvre, celle des esclaves noirs, les indiens étant jugés peu aptes au travail manuel. L'Église catholique et les jésuites tentent vainement de réguler les relations entre maîtres et esclaves. Les fazendeiros, détenteurs de la richesse – l’Europe des XVII et XVIIIème siècles est avide de sucre –, n’en font que selon leur bon vouloir. Aujourd’hui encore, ils forment une portion de l’ossature de la bourgeoisie du Brésil.
A la nécessité d’une abondante main d’œuvre noire, s’ajoute la rareté des femmes blanches. Ainsi les femmes noires, du lit du maître et d’objets sexuels, vont entrer dans son salon et être forcées à “participer de sa famille”. Les abus sexuels sont un élément fondamental de l’histoire de la colonisation portugaise, miscégénation qui enclenche un début de démocratisation raciale jusqu’aujourd’hui inaboutie.
Il y aurait deux Brésils, dont on évoque la possible partition, nous disent de nombreux livres. Celui du nord, que Gilberto Freyre analyse si bien, et celui du sud qui est "européen". Est-ce si sûr pour ce dernier? Je vous déconseille de suggérer aux Madames bourgeoises blanches de l’avenida Paulista à São Paulo que leurs traits tiennent de la miscégénation, et pourtant…c’est bien vrai!